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Le sénateur Pierre Frogier interpelle le ministre des outremers Sébastien Lecornu qui est toujours en quatorzaine, mais qui doit avoir plusieurs entretiens téléphoniques ces prochains jours, avec les responsables politiques calédoniens.
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Dans une lettre ouverte, le sénateur qui est aussi signataires des accords de Matignon et de Nouméa, écrit à Sébastien Lecornu que son "impérieuse obligation est de permettre à nos concitoyens d’échapper à un affrontement mortifère et de prendre des décisions politiques pour l’avenir de nos populations."


Nouméa, le 18 octobre 2020


Lettre ouverte au ministre des outremers Sébastien LECORNU


Pour la deuxième fois, la Nouvelle Calédonie a choisi de rester française.


Nous en sommes fiers.


A la signature des Accords de Matignon, un pacte a été passé entre trois partenaires qui ont patiemment recherché le compromis et ont su faire des concessions réciproques.


Ce processus exemplaire nécessitait des partenaires de la confiance, du respect et de la sérénité.


Mais j’ai toujours considéré que ce processus fragile et précieux risquait de se fracasser sur un référendum qui, dans sa brutalité majoritaire, ne nous apporterait aucune solution d’avenir.


Et c’était sans compter sur les conditions dans lesquelles s’est déroulé le scrutin du 4 Octobre, qui auront entaché durablement cette volonté de construire ensemble.


En effet, les pressions, les insultes voire les menaces proférées par les militants favorables à l’indépendance ont émaillé cette journée, dans le but de dissuader et même d’effrayer les électeurs de l’autre camp afin d’obtenir par la violence un résultat meilleur qu’il y a deux ans.


Sans qu’un seul des responsables du FLNKS ne dénoncent de tels actes.


Pire, ces agissements ont eu lieu dans l’indifférence totale du représentant de l’Etat.


Au-delà de nos engagements partisans, ce qui a été bafoué ce 4 octobre, c’est le droit de vote, un des droits fondamentaux reconnus par la République, assurant à chacun le droit de choisir son avenir dans la liberté et la sérénité.


Depuis des années, par son inaction, sa passivité, son absence d’autorité, l’Etat s’est interdit de nous aider à trouver le chemin de la sagesse, de l’intelligence, de l’humanité et du cœur avant qu’il ne soit trop tard.


J’entends encore les mots de Michel Rocard dans une interview donnée peu de temps avant sa disparition : "Personne ne peut avoir dans la tête, le souhait que la question qui va être posée à ce référendum soit choisie de manière à diviser les Calédoniens en deux paquets égaux.


Parce que là, on est sûr qu’ils recommenceront à se taper dessus"


Monsieur le Ministre,


Votre impérieuse obligation est de permettre à nos concitoyens d’échapper à un affrontement mortifère. C’est de prendre des décisions politiques pour l’avenir de nos populations.


Peut-être, saurons-nous alors renouer avec l’esprit et la démarche, initiée par Michel Rocard qui affirmait le 5 mai 1998 : "l’Accord de Nouméa concerne beaucoup plus que la Nouvelle Calédonie. C’est un acte de civilisation"


Pierre FROGIER


Sénateur de la Nouvelle Calédonie


Signataire des accords de Matignon et de Nouméa

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P. Frogier écrit à S. Lecornu