Il faut laver son linge sale en famille et les responsables de l'Union calédonienne l'ont bien compris. Ils ont choisi le huis-clos pour leur comité directeur qui se réunissait ce samedi à Voh.
Et pourtant, on aurait bien aimé savoir ce qu'ils se sont dit et quel est le bilan qu'ils font, trois mois après le début de l'insurrection violente de la CCAT, qu'ils ont nourrie en leur sein.
Et l'on se pose au moins deux questions : Y en a-t-il, parmi eux, qui condamnent ce déferlement de violences et ont-ils osé le dire face à leurs délégués ? Et y en a-t-il, parmi eux, qui assument cette folie destructrice et ont-ils tenté de la justifier face aux membres du comité directeur ?
Et au-delà, comment voient-ils la suite ? Envisagent-ils de se désolidariser de la CCAT en reconnaissant s'être laissés débordés par sa fureur ou vont-ils, au contraire, la consolider en estimant qu'ils n'ont plus le choix et qu'il est trop tard maintenant que le monstre leur a échappé.
Et d'ailleurs, les élus UC contrôlent-ils quelque chose dans ce mouvement ultra violent qui les menacent directement en mettant en cause leur gouvernance et leur légitimité, en affirmant clairement qu'ils doivent être remplacés ?
Il devait y avoir une drôle d'ambiance à la tribu de Boyen et si certains élus de premier plan avaient préféré ne pas faire le déplacement, il y avait tout de même plusieurs personnalités emblématiques qui, publiquement, n'adoptent pas les mêmes positions.
Le tout nouveau député Emmanuel Tjibaou tient-il un discours aussi modéré quand il parle devant le comité directeur que lorsqu'il s'exprime dans les médias ? Le globe-trotter Mickaël Forrest s'est-il vanté des propos qu'il a tenus à Bakou et à Corte et s'est-il excusé de ses absences répétées du gouvernement ? Et qu'a bien pu dire Matthias Chauchat aux membres du comité directeur ? A-t-il justifié la stratégie de la terre brûlée dont certains le soupçonnent d'être l'inspirateur ou a-t-il pontifié, façon professeur de droit public, pour expliquer aux élus UC quelle devait être la suite institutionnelle de ce mouvement ?
Beaucoup de questions qui resteront sans réponse mais on espère que ce huis-clos aura aussi permis de trancher quelques positionnements qui, jusque-là, ne faisaient pas l'unanimité au sein de l'Union calédonienne. Sur le 24 septembre qui – de l'avis général – est une date à risque. Sur la reprise ou non des discussions politiques, sur le report ou non des élections provinciales et, avant cela, sur la tenue ou non du congrès du FLNKS.
La CCAT – encore elle – a réclamé la réunion, avant la fin du mois, d'un congrès de l'ensemble de la mouvance indépendantiste. Il permettrait là aussi, de laver le linge sale en famille et les règlements de compte risquent d'y être violents. Mais est-ce le bon moment et faut-il, impérativement, répondre aux exigences de la cellule de coordination ? Ce ne serait pas la première fois qu'un congrès du FLNKS est reporté.
Le problème, c'est que les atermoiements de la mouvance indépendantiste risquent encore une fois de plomber toute avancée. Et on ne parle pas des discussions institutionnelles qui semblent prématurées mais de la phase de reconstruction. L'Etat va-t-il, sans garantie, transférer des crédits importants à des institutions et à des collectivités gérées par des indépendantistes ? Certains en doutent et qui pourrait lui en vouloir.
De toute façon, on n'en est pas là. Il faut attendre le vote de la loi de finances par le Parlement pour espérer une aide substantielle de l'Etat et pour cela, il faut qu'il y ait un Premier ministre et un gouvernement, soutenus par une majorité. La Nouvelle-Calédonie est, comme d'autres, tributaire de l'issue de la crise politique nationale.
Avec un petit espoir. Maintenant que les Jeux Olympiques de Paris sont terminés et que les vacances d'été tirent à leur fin, la métropole va peut-être se rappeler qu'il y a une crise en Nouvelle-Calédonie.