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"Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde", disait Albert Camus et c'est un défaut dont souffre la Nouvelle-Calédonie, "le pays du non-dit" où l'on a souvent de la peine à appeler les choses par leur nom.
A titre d'exemple, la période de guerre civile que le territoire a connue, de 1984 à 1988, est toujours pudiquement appelée "les événements".
Comme si parler, à mots couverts, d'une situation délicate ou terrible en diminuait l'intensité ou l'atrocité.

Et le même phénomène est en train de se produire actuellement où beaucoup - notamment dans les médias d'Etat - hésitent à parler d'émeutes ou de violence insurrectionnelle, pour préférer évoquer "la crise". 
A les entendre, tout ce qui arrive, les fermetures d'entreprises, l'augmentation du chômage, la paupérisation de la population, le départ des médecins... c'est à cause de "la crise". Un terme neutre et ambigu qui désigne les conséquences de l'insurrection mais qui gomme son origine et ses responsabilités. 

Alors certes, la Nouvelle-Calédonie est en crise et elle connait même une triple crise politique, économique et sociale de grande ampleur, mais il est par trop réducteur d'employer ce vocable à tout va comme si la crise n'avait aucune cause, aucune raison, comme si c'était une fatalité, et que personne n'en est comptable.

On le sait bien. Le chaos que connait la Nouvelle-Calédonie n'est pas le fruit du hasard. Il y a bien eu des émeutes orchestrées par la CCAT, émanation de l'Union calédonienne. Il y a bien eu des émeutiers animés d'une folie destructrice. Il y a des coupables, des commanditaires et des donneurs d'ordre. Et ne pas les nommer, c'est ajouter aux malheurs de la Nouvelle-Calédonie qui en a déjà bien assez comme cela.

Et de la même manière, l'UC ne peut pas jouer les Ponce Pilate et s'en laver les mains comme le font ses élus qui narguent la population calédonienne en prétendant qu'ils n'y sont pour rien et que tout est de la faute de l'Etat.
Ils n'ont pas le droit de décliner toute responsabilité en affirmant qu'ils avaient prévenu et en menaçant de recommencer s'ils n'obtiennent pas gain de cause sur leurs nouvelles revendications. 
Ils n'ont pas le droit d'invoquer une mobilisation pacifique qui aurait mal tourné avec des débordements qu'ils ne cautionnent pas mais qu'ils ne condamnent pas. 
Ils n'en ont pas le droit parce qu'ils sont censés être les héritiers des accords de Matignon et de Nouméa dont leur parti est le signataire. Et que cela les engage.

Mais curieusement, c'est de la mouvance indépendantiste, elle-même, que vient le rappel à l'ordre et c'est Paul Néaoutyine qui tape du poing sur la table. Il l'avait déjà fait fin juin, face à l'assemblée de la Province Nord, en déclarant que "la stratégie politique des violences et des exactions n'a rien à voir avec le FLNKS et qu'en sortie de crise, chacun devrait prendre ses responsabilités". Il a frappé plus fort encore ce week-end en déclarant que le décès d'un jeune tué par un tir de riposte de la gendarmerie le 15 août, à Thio, "relève de la responsabilité des relais CCAT concernés, ainsi que de leurs donneurs d’ordre qui se couvrent du drapeau Kanaky et usurpent le sigle FLNKS dans une stratégie du chaos décidée par une seule composante du FLNKS".

Pour le coup, le maire de Poindimié et président de la Province Nord ose nommer les choses et les coupables. Mais l'UC reste à l'offensive et elle n'a pas renoncé à faire main basse sur le FLNKS avec ses satellites que sont la CCAT mais aussi le RDO, le Parti travailliste, l'USTKE et la myriade de petits mouvements indépendantistes qui lui sont affidés. 

Face à cette coalition des ultras, l'UNI PALIKA n'a pour seul soutien au sein du FLNKS, que l'UPM et peut-être une partie des coutumiers qui n'étaient pas restés inertes lors du congrès avorté de Netchaot. 
Mais pour nommer les choses, le congrès du FLNKS le week-end prochain sera, clairement, celui du rapport de force voire celui des règlements de compte.

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